Quelques heures après la mise en ligne de cet article, la guerre s’abattit sur notre pays.
L’Europe voit ses fondements menacés par ce que l’on a appelé la crise des migrants. La situation politique en Allemagne et dans toute l’Europe doit nous interpeller. On n’arrête pas l’eau qui coule… Il faut aller à l’origine du problème. Observons donc ce Proche Orient où nous vivons des évolutions qui impacteront fortement notre vieille Europe et la France dans les semaines à venir.
Le fait est que l’intervention massive russe a clairement changé la donne sur le terrain. Cette semaine les troupes de Bachar Al Assad (SAA) ont remporté des victoires symboliques et stratégiques qui ont des répercutions sur la lecture de la situation en Syrie. Avec l’aide de milices chiites irakiennes, de renforts iraniens et du Hezbollah sans oublier les nombreuses frappes russes, les troupes de la SAA ont réussi à briser un siège de 35 mois autour de l’aéroport de Kuweires au Nord-Est d’Alep face à Daesh. Ce front est aujourd’hui entrain de se renforcer. A la manœuvre un personnage important des offensives SAA, le Colonel El Hassan, le fameux Tigre, un alaouite comme Assad. Brillant officier, héro et grand fidèle du régime que certains imaginent comme une solution politique de substitution à Assad.
Au Sud-Ouest d’Alep, 2e ville de Syrie, l’avancée rapide des forces fidèles à Damas depuis 2 jours fait naitre l’idée de l’écroulement d’un front tenu par Al Nusra (Al Qaida) et d’autres groupes rebelles la plupart islamiste. Les observateurs ont par ailleurs de plus en plus de mal à identifier sur le terrain des éléments que l’on pourrait qualifier de modérées et laïques. Via cette offensive, l’objectif de la province de Idlib et de l’enclave chiite tenu par les SAA au nord de cette ville ? Cette province est aussi attaquée par l’Ouest via la plaine d’Al Ghab, ce qui pose la question de la capacité de la rébellion à renforcer le front d’Alep.
Cela image l’importance du retournement de la situation militaire sur le terrain. Les efforts russes et iraniens aux cotés de Damas portent leur fruit. L’objectif étant de rendre incontournable Assad dans la recherche d’une solution politique. Pour cela il faut rééquilibrer la situation militaire pour renforcer les positions diplomatiques. C’est en cours. L’occident se trouve donc face à de sérieuses difficultés politiques et diplomatiques.
Pour bien comprendre ces difficultés, mettons en parallèle l’ampleur stratégique des opérations en Syrie avec l’offensive Kurde contre Daesh soutenu par les USA sur la très symbolique ville de Sinjàr en Irak, au pied du fameux mont Sinjàr qui avait été le théâtre du génocide des Yezidis par Daesh. Un coup de menton tactique. N’oublions pas que la solution Kurde, peut-être le pion le plus sain de la coalition contre Daesh ne résiste pas aux pressions d’une étrange Turquie membre de l’ OTAN qui les bombarde…
Nous observons donc une évolution militaire qui a des impacts politiques majeurs au profit du régime de Damas, de la diplomatie russe et dans une moindre mesure iranienne. L’hypothèse d’un écroulement militaire de la rébellion dans la province d’Alep est crédible et pourrait avoir un impact sur la fuite des civils de ce territoire vers la Turquie. Pendant ce temps-là, la diplomatie français, sans dynamisme, subit les évènements sans les saisir pour agir stratégiquement face à une Russie qui travaille à sa renaissance en tant que puissance incontournable.
A bientôt.
Grégory Sansoz